Dans le créneau de la production industrielle, le rassemblement des entreprises dans des espaces aménages dit « zones industrielles », s’avère aujourd’hui insuffisant pour favoriser, d’une part, les contacts entre la recherche et l’industrie et, d’autre part, l’implantation de nouvelles entreprises génératrices de haute technologie. La création des Technopoles est donc venue répondre à ce nouveau besoin et ce, depuis une quinzaine d’années dans l’ensemble des pays industrialisés tels que les USA, le japon, l’Allemagne, la France et l’Angleterre, ou plus de 400 technopoles sont d’ores et déjà opérationnelles. Preuve qu’aujourd’hui, la première source de création de la valeur c’est de plus en plus la « matière grise ». La Tunisie ayant connu un développement industriel assez important notamment au cours des trois dernières décennies, a réalisé sa première technopole.
La Technopole ou le triangle d’or : La clé du succès industriel repose essentiellement sur le rassemblement en un même lieu des activités de recherche, de formation et d’industries innovantes. La Technopole, selon l’esprit de ses promoteurs fondateurs dont M. Pierre LAFFITTE, père des Technopoles en France, est un parc d’affaires au un parc d’activités innovantes. Elle rapproche la recherche de l’industrie, l’université de l’entreprise, et contribue à la création d’entreprises dans les secteurs High Tech. De ce fait, la Technopole est un espace aménagé, un lieu de rassemblement d’entreprises de pointe. (Exemple : en Grande-Bretagne, le « Sciences Parcs de Cambridge » regroupe 300 industries de pointe). On peut dire aussi que la Technopole, selon d’autres formules avancées, est la consécration territoriale d’un heureux mariage entre la recherche et l’industrie. En définitive, la Technopole est un triangle d’or (Recherche, Université, Industrie) s’identifiant à une « ville intelligente » constituant le moyen suprême de dynamiser la vie économique et sociale d’une région.
Technopoles et matières grises
Les objectifs des Technopoles sont multiples. Nous en citons les plus importants:
Rassembler sur une me même aire géographique les potentialités scientifiques existantes dans une région donnée.
Créer un environnement idéal pour le transfert technologique et la création d’entreprises de pointe.
Multiplier les rencontres entre chercheurs et industriels par le moyen de la fertilisation croisée pour faire naitre de nouveaux produits et de nouveaux projets de haute technologie.
Canaliser l’apport en capitaux en faveur de l’épanouissement de la matière grise.
Renforcer la crédibilité internationale par l’ouverture de nouveaux horizons technologiques et de nouveaux marchés.
Créer des synergies recherche-industrie et des liens de rencontre et d’échange entre deux mondes cloisonnés.
Offrir une base de données scientifique et technique, support indispensable pour l’information et le développement.
A quelles conditions?
La Technopole est avant tout un état d’esprit. Elle requiert, pour sa création, un minimum d’activités de recherche, de centres de recherche et développement de haut niveau et d’industries innovantes. L’agglomération candidate à l’accueil de telle structure doit nécessairement offrir:
Un environnement élaboré : chercheurs et formateurs à proximité.
Une infrastructure de base (routes, aéroport, télécommunications) développée.
Les composantes principales susmentionnées ne sont pas suffisantes pour la création d’une Technopole. Encore faut-il des terrains bien situés s’étendant sur plusieurs hectares (une cinquantaine d’hectare, par exemple, pour le démarrage de l’opération), dont une bonne partie sera réservée aux espaces verts et aux aménagements sociaux et culturels.
Bien entendu, ces structures doivent regrouper tous les partenaires concerne (collectivités, investisseurs et. industriels gravitant autour de leaders fondateurs (promoteurs).
Bref, la Technopole est plutôt une affaire de promoteurs et d’aménageurs. Elle ne se décrète pas, elle demande néanmoins l’engagement de tous, en particulier celui des chercheurs et des universitaires. Mais comme le dit bien Pierre LAFFITTE « La Technopole, ce n’est pas le travail de l’Etat ». A notre sens, le rôle de l’Etat se limiterait à soutenir les initiatives, à stimuler et à encourager l‘implantation et l’émergence de tels espaces scientifiques et intelligents.
« Guerres … de technopoles » Il est certain que le monde actuel vit une ère de veille technologique, c’est pourquoi on assiste aujourd’hui, particulièrement dans le monde industrialisé, à une véritable chasse aux entreprises industrielles et de service, notamment dans les secteurs de pointe. C’est une véritable course aux Technopoles. On parle même de « Guerres des Technopoles ». En France par exemple, chaque ville veut avoir sa Technopole. La Tunisie a rattrapé ce mouvement pour pouvoir atteindre ses objectifs de croissance et de développement économique. En plus, nous avons bien compris que la réalisation d’une Technopole n’est pas une fin en soi. Et nous savons déjà qu’une Technopole suppose, au préalable, un environnement élaboré et un potentiel de savoir-faire important. C’est une œuvre de grande haleine, une volonté commune et un esprit dynamique.
TECHNOPOLE : Bien réfléchir avant de bâtir
Au début des années 1980, le nombre de parcs scientifiques et technologiques et de technopoles ne dépassait certainement pas la vingtaine dans l’ensemble du monde, avec quelques exemples emblématiques, sortes clé « Pères Fondateurs » du mouvement des technopoles et parcs scientifiques. Aujourd’hui, on compte très probablement près de 800 parcs et technopoles, et le phénomène n’est plus, comme c’était le cas auparavant, un phénomène réservé aux pays hautement industrialises. On trouve des parcs presque dans le monde, et notamment de plus en plus dans les nouveaux pays industrialisés et quelques pays en voie de développement connaissant des taux de croissance élevés, depuis le Brésil jusqu’à Malaisie, la Thaïlande, la République Populaire de Chine, la Turquie et bien sûr la Tunisie. Les projets se multiplient par ailleurs en Europe centrale et orientale, ainsi que dans la C.E.I. (Communauté des Etats Indépendants : Russie, Biélorussie et Ukraine), même si, dans ce dernier cas, le passage des projets à des réalisations effectives semble difficile en raison d’absence de stratégies claires de développement.
En fait, les deux seules zones du monde encore peu touchées pour le moment par le phénomène » Technopole » sont le continent africain et le Moyen-Orient.
Pour ce qui est de l’Afrique, on doit voir un aspect particulier de la quasi- absence clé l’Afrique. depuis environ deux décennies, des grands courants d’affaires internationaux. On signalera cependant un tout petit nombre de projets sérieux et avances en Afrique du Nord, plus précisément au Maroc et surtout en Tunisie.
Au Moyen-Orient, seul Israël participe véritablement au mouvement (II y a un projet cependant en Arabie Saoudite).Il n’existe pas de modèle de technopole ou de parc scientifique. Aucun modèle idéal, existant ou purement conceptuel, n’est disponible, permettant de maitriser à coup sur les recettes du succès. En revanche, ce qui est bel et bien disponible et extrêmement précieux, c’est un portefeuille d’expériences, correspondant à des opérations modestes comme à des opérations très ambitieuses, ayant donné lieu à des réussites brillantes comme à des demi-échecs, voire a des échecs véritables, menés par des universités ou des collectivités locales ou des entreprises privées.
Certaines études de cas que nous présentons plus bas relèvent d’un tel portefeuille d’expériences et concernent des projets dont on peut considérer sans hésitation qu’ils ont réussie. D’ailleurs, la bien célèbre Silicon Valley (Etats-Unis) avec ses » succès stories » et qui a bel et bien démarré au fond d’un garage reste un modèle de réussite. II est par ailleurs indispensable de souligner combien les différences culturelles et institutionnelles entre pays obligent à renouveler l’approche de la création et du développement d’un parc. Ainsi, une université britannique ou américaine, propriétaire de terrains, peut facilement être le promoteur d’une opération, ce qui est absolument impossible en principe pour une université française, dont les terrains et bâtiments font partie du domaine public. La différence entre le succès et l’échec dans le contexte économique international dépend pour beaucoup de la capacité des différents pays à améliorer l’environnement scientifique et technologique de leurs entreprises au niveau local: c’est bien au niveau local que les dispositifs d’appui a l’innovation sont les plus efficaces.
TECHNOPOLES : deux exemples de réussite
TECHNOPOLE SOPHIA-ANTIPOLIS (FRANCE) Il s’agit de la plus ancienne réalisation européenne dans le domaine. L’idée a été lancée au début des années 60 par Pierre Laffitte ancien Directeur de l’Ecole des Mines de Paris. Elle a démarré en 1972 avec l’aménagement des terrains entre Nice-Antibes et Grasse avec l’objectif d’y installer des activités scientifiques et de recherches, et des activités tertiaires publiques et privées. Les premières entreprises s’y installent en 1974. Les principales caractéristiques et composantes du Technopole Sophia-Antipolis sont les suivantes : surface: 2 300 ha dont deux tiers aménage en espaces verts, une Université, des institutions d’enseignement supérieur comme l’Ecole des Mines de Paris, des Centres de recherche (publique et privée). Mais également: 25 000 étudiants, 4 000 chercheurs, 16 000 emplois d’ingénieurs et techniciens et 1000 entreprises, dont 200 entreprises de recherche privée et 100 entreprises étrangères.
Branches d’activités
Technologie de l’information : ce secteur travaille en étroite relation avec les centres de recherche et l’université.
Sciences de la vie. C’est un secteur très prometteur. Il concerne une cinquantaine d’entreprises de renom international et emploie 2100 personnes. Ce secteur s’appuie sur les centres de recherche, les instituts et les laboratoires, privés et publics installés sur le site ou dans son environnement proche. C’est aussi un secteur très ouvert : pharmacologie, spécialités médicales, chimie fine, appareillage chirurgical et médical, technologie de l’information.
Environnement et matériaux : C’est un secteur très orienté vers la recherche et une vingtaine d’entreprises existent déjà.
En outre, il faut préciser que la Technopole assure l’accueil des entreprises et maintient la qualité environnementale du site. L’installation des entreprises se fait selon quatre critères : la nature technologique de l’activité, l’absence de pollution et de nuisance, le type et le nombre d’emplois crée.
RESEACH TRIANGLE PARK (Etats-Unis – Caroline du Nord)
Reseach Triangle Park (RTP) a été créé en 1958 afin de contribuer au développement de la Caroline du Nord et d’endiguer la fuite des jeunes diplômés de la région. Le (RTP) gère les contrats de R&D (Recherche et Développement) des laboratoires de R&D et des industriels. Il dispose de 56 000 m 2 de laboratoires et de bureaux à Washington, en Floride, en Virginie ainsi que hors des Etats-Unis. II emploie I 500 personnes. Les principales caractéristiques et composantes du RTP sont les suivantes :
3 Universités dans un rayon de 45 km. Environ 63 000 étudiants
94 entreprises et organisations gouvernementales employant 34 000 chercheurs, ingénieurs et techniciens
3 500 hectares dont une partie est boisée.
Branches d’activités Micro-électronique informatique, technologies de l’information, sciences de l’environnement, chimie-biotechnologie, pharmacologique, biologie, microbiologie, chimie analytique, organique … Au total 10 organismes de R&D (Recherches et Développement), télécommunications: (15 organismes de R&D) o Sante- médicament, programmes de recherche publique sur le sida, la fertilité, la gérontologie … Au total 15 organismes de R&D. le RTP a fait la démonstration que entreprises et universités peuvent coopérer au bénéfice du développement local. Les entreprises ont découvert de nouvelles opportunités de développement et les universités ont pu attirer des scientifiques de renom.
Principales fonctions Attirer les centres de recherche, rapprocher recherche et entreprise, ouverture des bibliothèques universitaires à la consultation par les entreprises, ouverture des chercheurs sur l’entreprise. Lancement de projets mêlant universitaires, chercheurs et entreprises. 700 membres de la communauté académiques sont aussi des consultants pour les entreprises du parc et réciproquement pour les professionnels en entreprises. Ces deux exemples cités, à savoir le Reseach Triangle Park (E.u. Caroline du Nord) et Technopole SOPHIA – ANTIPOLIS (France), sont de nature à montrer l’intérêt des technopoles qui, bien gérées, deviennent une inépuisable source de développement scientifique, technologique et économique. Ce sont les deux exemples de réussite que les promoteurs tunisiens de technopoles doivent absolument étudier de très près.
A retenir…II existe une polémique sur le genre grammatical de « technopole ». Ceux qui penchent pour le masculin voient dans ce mot la contraction de « pôle technologique », C’est-à-dire une zone industrielle spécialisée sur telle ou telle haute technologie. D’autres, dont nous faisons partie, estiment qu’il s’agit bien d’une ville, avec la plupart de ses fonctions habituelles, dont l’activité est tournée vers la haute technologie; le féminin s’impose ‘alors pour un mot dérivé de « polis », qu’on retrouve aussi dans « métropole ». II existe à la vérité une troisième école, qui voit dans le technopole l’association de « technologie » et « monopole ». Il s’agira alors du monopole que s’arrogent ceux qui détiennent le savoir technologique.
Selon Hubert Curien, ancien ministre français de la Recherche et de la Technologie : » C’est très sympathique de voir se multiplier les initiatives, mais il ne faut pas être naif: une technopole ne se limite pas à l’installation d’une zone industrielle dans un joli site.Une technopole ne se décrète pas, elle se mérite ».
Beaucoup de technopoles ne méritent pas leur nom. Ce sont des zones industrielles classiques
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