mercredi , 16 octobre 2024

LES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION ET DE COMMUNICATION (TIC) AU SERVICE DE L’AMELIORATION DE LA SECURITE ROUTIERE :

Le Thème de la sécurité routière s’inscrit dans les objectifs de la Résolution A/RES/64/255 de l’Assemblée Générale des Nations Unies (NU), qui traite de l’amélioration de la sécurité routière dans le monde et qui proclame la décennie 2011-2020 « Décennie d’action pour la sécurité routière ».

          Les NU, s’efforcent, à travers ce thème, de sensibiliser les décideurs, au niveau de tous les pays, sur l’importance de la mise en place d’une stratégie susceptible de renforcer la sécurité routière par tous les moyens, y compris par l’utilisation des TIC.

         En effet, selon les NU, près de 1,3 millions de personnes meurent chaque année, et entre 20 et 50 millions sont blessées dans des accidents de la circulation, surtout dans les pays en voie de développement ou émergents, comme le nôtre, qui compte 4000 morts par an, en moyenne. Toujours selon les NU, les pertes économiques mondiales qui en résultent se chiffreraient à 4500 milliards de dirhams. Dans notre pays, ces pertes sont estimées annuellement à 15 milliards de dirhams.

         La Sécurité routière constitue une priorité de la santé publique et un enjeu de protection des personnes. Aux  actions de prévention routière habituelles, il y a lieu de noter,  l’utilisation de plus en plus des TIC comme moyen d’aide au renforcement de cette sécurité.

         En effet, diverses applications, découlant de l’interaction entre la sécurité routière et les TIC, sont soit opérationnelles soit en cours d’expérimentation un peu partout dans le monde. Au niveau des grands congrès afférents aux TIC, sur le plan mondial, comme ceux de Las Vegas (Etats-Unis) ou  de Barcelone (Espagne), le sujet de l’interaction entre les TIC et l’industrie des voitures est d’actualité.

         Les objectifs visés à long terme au niveau international, par les chercheurs et les différents acteurs dans les TIC et dans l’industrie des voitures, est de concevoir des voitures roulant sans conducteurs afin d’atteindre une situation où on aura une sécurité routière avec presque zéro accidents. Même si, à priori, ce thème retenu n’est pas encore d’une grande actualité au Maroc, il est primordial de s’y intéresser pour maintes raisons dont on pourrait décliner les principales ci-après :

– Le Maroc commence à utiliser les TIC comme outils d’aide à la sécurité routière ;

– Notre pays est devenu une plate-forme internationale pour la fabrication des voitures ;

Quelques exemples d’interaction entre TIC et sécurité routière:

         Actuellement, toutes les technologies embarquées dans les véhicules sont à considérer comme des aides à la conduite et à la sécurité et le conducteur reste responsable de ses actes. Dans un avenir proche, il faut s’attendre à des voitures qui s’auto-conduiront avec une intervention humaine minimale. Les technologies TIC intégreront davantage les systèmes de conduite des voitures et rendront ainsi les routes plus sûres.

         En effet, le nombre des accidents de la route causés par des erreurs humaines est de loin supérieur à celui dû  aux défaillances du matériel roulant. La tendance d’une maîtrise plus complète de la technologie sur le contrôle du véhicule sera  certainement nécessaire pour atteindre le niveau de Zéro accident à peu près. Déjà des expériences réelles sont entamées dans ce domaine :

-Dès octobre 2010, l’un des géants de la recherche sur internet (Google) annonce la conception d’un système de pilotage automatique pour automobile. Il a déjà installé ce système sur huit véhicules de différentes marques qui ont parcouru plusieurs milliers de km en Californie, sans avoir provoqué d’accident. Ce projet a démarré, en 2005, au sein de l’université Stanford au Silicon Valley (USA). Le principe consiste à installer sur le système de pilotage automatique, une caméra, des radars, un récepteur GPS, des capteurs sur les roues motrices et la télédétection par laser ou LIDAR. Le véhicule, qui est conduit de manière autonome, n’a plus qu’à gérer les modifications de signalisation pendant son trajet. Le système autonome de ce géant de l’internet permet à un conducteur humain de reprendre à tout moment le contrôle de sa voiture. L’installation du système de pilotage automatique de test coûte environ 1,3 millions de dirhams par voiture, rien qu’en équipement, selon une estimation faite en 2011.

         Toutefois, une des limitations du système, est son incapacité à comprendre les gestes manuels d’un agent de la circulation. Dans le domaine du droit, et selon le journal le New York Times, les régulateurs et les décideurs politiques ont montré que de nouvelles lois seront nécessaires si les véhicules sans conducteurs devaient devenir une réalité. Le Nevada aux USA a déjà adopté une loi en juin 2011 sur le fonctionnement des voitures sans conducteurs, qui est entrée en vigueur le 1er mars 2012.

-Début  2013, à  l’université d’Oxford en Angleterre, des chercheurs ont mis au point une voiture contrôlée par une tablette. La voiture se comporte comme un avion sous pilotage automatique. Ce genre de pilotage est conçu pour fonctionner dans des conditions de circulation surchargée ou sur des parcours habituels.       Dénommée « la Robot », celle-ci a été mise au point sur la base d’une voiture électrique. Elle  est équipée  de caméras et de lasers. Un laser à l’avant scanne la route 13 fois par seconde pour détecter les obstacles éventuels; s’il en détecte, la voiture ralentit et s’arrête sur le champ. Néanmoins, pour les chercheurs d’Oxford, la technologie ne sera pas au point ni installée avant une quinzaine d’années.

– La revue 01 business dans  le numéro N°2162 du 28 février 2013 a fait l’écho d’une expérience intéressante au Japon : La société Sompo, en collaboration avec une compagnie d’assurance, ont développé une application où l’iPhone devient un copilote appelée « safety sight ». Cette application utilise, comme principe, une caméra pour analyser ce qui se passe devant le véhicule du conducteur. Par exemple elle émet un signal sonore quand un véhicule, qui précède, est trop proche afin de prévenir une éventuelle collision.    Pour encourager ce genre d’applications, l’UIT préconise l’harmonisation de la bande de fréquences 79 GHz pour les radars automobiles à haute résolution et à faible portée, en l’occurrence  lorsque la Conférence Mondiale des Radiocommunications prévue fin de 2015 examinera l’attribution de la bande 77,5-78 GHz au service de radiolocalisation. Ces fréquences vont permettre aux constructeurs d’automobiles de prévoir une série d’applications permettant d’améliorer  la sécurité routière dans l’environnement immédiat des voitures.

Notons que certaines de ces applications ont été déjà utilisées avec succès lors des rallyes Paris Dakar, après avoir été testées sur différentes épreuves en 2004. Ces applications prévoient des avertisseurs de sécurité destinés à favoriser les dépassements entre divers engins. Le système possède également une puissante alarme jusqu’à 500 mètres qui avertit qu’un accident s’est produit ou qu’un véhicule est arrêté hors du champ de visibilité. Une séquence sonore et lumineuse se déclenche dans tous les véhicules jouxtant le lieu de l’accident.

         Il est opportun de souligner, par ailleurs, que des  tentatives sont en cours pour que ces systèmes soient, dans une première étape proposés en option aux conducteurs désireux de rouler avec plus de sécurité routière.

-Aux derniers  congrès de  Barcelone, les grands constructeurs de voitures multiplient l’exposition et la présentation des expériences de voitures connectées aux réseaux mobiles. A travers un Smartphone, on  peut avoir une idée sur l’état mécanique de la voiture ou connaître le nombre de kilomètres à parcourir avec le niveau du carburant existant dans le réservoir. Le Smartphone permet même de climatiser la voiture à distance, en fonction de la température ambiante. La voiture peut même passer un coup de téléphone automatique aux secours en cas d’accident. C’est la carte SIM intégrée dans l’automobile qui envoie un SMS en précisant les coordonnées du véhicule. Celui-ci se fait dans la langue du pays où a eu lieu le sinistre.

-Pour protéger la catégorie des plus exposés aux accidents tels que piétons, motards et cyclistes, le Centre National de Recherche Scientifique et l’Université de Clermont-Ferrand en France travaillent sur  un projet visant à développer des logiciels d’observation de cette catégorie des personnes vulnérables  en exploitant des données issues de capteurs de différentes natures, et ce, pour proposer des solutions de repérage de ces personnes. La plus grande partie de l’innovation se situe dans la mise en commun des données fournies par les capteurs. Les résultats majeurs du projet sont la mise au point et la comparaison de différents algorithmes de traitement de ces informations reçues.  Ces applications seront très utiles, car d’après le dernier rapport de l’Organisation Mondiale de Santé, « Les piétons, cyclistes et motards sont particulièrement exposés. Ensemble, ils représentent la moitié des victimes de la route à l’échelle mondiale ; jusqu’à 80% dans les pays en développement ».

         Déjà à présent, il est tout à fait possible de superviser le déplacement d’une voiture à travers les différents réseaux de télécommunications et des échanges sont assurés en permanence entre le véhicule et un point central, traitant les informations en temps réel venant du véhicule. En cas de problème, celui-ci est  localisé par le point central. Ainsi on peut demander des secours d’urgence en cas d’incident grave.

Aussi, actuellement, utilise-t-on déjà Le GPS (Global Positioning System) comme moyen permettant l’amélioration de la sécurité routière. En effet, certaines entreprises améliorent la sécurité passive de leurs véhicules avec l’installation de systèmes de navigation intégrés avec l’accord des employés. Des boîtiers GPS sont intégrés dans les véhicules qui communiquent des données à distance à un logiciel informatique installé dans l’entreprise. Ces données permettent, entre autres, de connaître la position, la vitesse et des données concernant la maintenance du véhicule.

-Toujours dans le registre de l’amélioration de la sécurité routière, un système appelé « vidéo-verbalisation » a été mis en application en avril 2013 à Paris. A l’aide d’un ensemble de caméras mis en place dans la capitale française aux endroits les plus risqués, on  arrive à constater l’infraction à distance par vidéosurveillance et à photographier le véhicule pour en identifier la plaque d’immatriculation et établir le PV en vue de sa transmission au conducteur contrevenant.

         TIC et sécurité routière au Maroc

         Il convient de noter positivement la volonté de la société nationale des autoroutes d’améliorer la communication avec les usagers à travers divers canaux telle la mise en place, en 2013, d’un numéro unique, le 5050 prévu pour l’accès à un centre d’appels destiné aux usagers des autoroutes en quête de diverses assistances. En effet et concernant les appels de secours,  les spécialistes estiment que jusqu’à 2 500 vies en Europe pourraient être sauvées chaque année et les séquelles des accidents seront atténuées si les secours pouvaient se manifester plus rapidement.

         Les canaux sous forme de panneaux à message variables prévu au Maroc est aussi intéressant. Les panneaux à Messages Variables (PMV) alimenté à 100% en énergie solaire sur les routes ou les sur les autoroutes sont équipés d’afficheurs et feux à diodes basse consommation. Les communications, à distance, avec ces panneaux se font via un modem GSM et on peut afficher des messages d’urgence ou des messages appelant les automobilistes à la vigilance. Le pilotage est assuré depuis le Poste de Commandement à distance. Si la signalisation sur les autoroutes est bonne, il lui manque toutefois quelques perfectionnements  pour se hisser aux normes internationales dont notamment le fait de signaliser aussi la vitesse minimale avec laquelle il faut circuler et de prévoir des radars pour contrôle des vitesses inférieures, à l’instar de ce qui se fait en Europe par exemple.

         Par contre,  en attendant l’intégration de plus de TIC dans notre signalisation routière, notre pays doit améliorer celle-ci pour qu’elle soit consommée d’une manière universelle.         En effet, on doit comprendre que la signalisation fait partie intégrante du paysage routier. Elle doit, par conséquent, être conçue selon les bases de la signalétique  et installée de manière à aider l’usager de la route quelle que soit sa provenance ou sa destination, tout au long de son parcours. L’objectif étant de lui permettre d’adapter sa conduite aux diverses situations qui se présentent à lui et de lui éviter les  hésitations et fausses manœuvres éventuelles. En Suède, lors de l’adoption en 1997 par le parlement suédois de la vision zéro accident, on a inséré dans la loi une idée novatrice et révolutionnaire qui consiste à porter la responsabilité des accidents non uniquement sur les usagers de la route, mais aussi sur les concepteurs du système de transport routier y compris la signalisation.

         En guise de conclusion, on pourrait considérer que pour le  Maroc et avant l’arrivée de ces solutions innovatrices et tellement salvatrices, il conviendrait notamment  de :

          – mettre en en place un site Internet et un centre d’appels au niveau national ou par région pour  permettre aux usagers de signaler toutes les difficultés rencontrées sur la route et de créer ainsi un réseau efficace d’information, annonçant par exemple des feux tricolores en panne, des défectuosités de la chaussée ou des absences de signalisation.

         – Sur les routes risquées, pousser les équipementiers des terminaux à prévoir l’option « mode voiture » au niveau des profils de communication prévus au niveau du terminal  à l’instar du « mode avion ». Dans ce mode, on exige que les abonnés aient recours à la boite vocale afin de laisser leur répondeur prendre un message quand ils reçoivent un appel  « Au volant, c’est la messagerie qui répond». Sur les routes moins risquées et dans le cas des situations urgentes, il serait souhaitable de prévoir l’utilisation des kits mains libres.

         – Les entreprises dotées de flottes de véhicules doivent s’engager pour la sécurité routière, en améliorant la sécurité passive de leur véhicules avec la fourniture de systèmes de navigation intégrés (GPS) pour connaître par exemple la vitesse et de suivre les données concernant la maintenance du véhicule et ce, en accord avec leur personnel.  En plus, ces entreprises doivent lancer des campagnes de sensibilisation de leur personnel aux risques routiers, notamment auprès de leurs collaborateurs itinérants, étant donné que le risque routier représente parfois le premier risque d’accident du travail. Les compagnies d’assurance sont aussi invitées à participer à ces programmes de sensibilisation.

         En attendant les voitures sans conducteurs, on va continuer au Maroc à subir les conséquences de nos comportements aux volants  avec tous les risques que cela comporte.  Quand on ne s’évite pas, on a plus de 10 morts par jours comme conséquence des accidents de la route au Maroc.

Par : Ahmed Khaouja

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