mercredi , 16 octobre 2024

M. Peter Schultz, co inventeur de la fibre optique, a accordé un entretien à Lte Magazine (Khaouja) sur notamment l’avenir de la fibre optique

Lte magazine : Aujourd’hui on arrive à transmettre cent térabits par seconde grâce à un simple brin  de fibre optique. Viendra-t-il un jour où on atteindra une limite théorique de la capacité de la fibre qu’on ne pourra pas dépasser ?

  1. Peter Schultz: Bien sûr. Il y’a une limite fondamentale de la capacité d’information qu’on peut véhiculer sur une fibre, limite imposée par la fréquence de l’onde de lumière transportant le signal à travers la fibre. Même si on atteint le minimum théorique de l’atténuation du signal, et même si on arrive à éliminer toutes les perturbations qui altèrent le signal, une capacité maximum sera imposée par la fréquence de cette onde « transporteuse ». D’autres facteurs entreront en jeux également comme la distance parcourue et le codage utilisé, mais la seule solution une fois cette capacité atteinte est de multiplier le nombre de route optique. La façon la plus simple pour accomplir cela est d’utiliser plus de fibres.

Lte magazine: En 1986, j’ai eu l’occasion de visiter les laboratoires Siemens à Munich (Allemagne) où j’ai vu un commutateur téléphonique optique qui opère entièrement avec de la lumière. Pensez-vous qu’un jour on pourra avoir des services intégralement optiques de bout en bout sans avoir à faire appel à la transformation optoélectronique ?

Peter Schultz: En principe, la lumière peut être contrôlé par la lumière, mais cela n’est pas généralement une méthode très efficace et nécessite soit relativement une grande énergie optique, ou des trajets assez longs. Par ailleurs, les circuits ou équipements optiques ont un grand inconvénient par leur incapacité à stocker la lumière de façon efficace, ce qui limite considérablement l’utilisation de fonctionnalités comme la mise en mémoire tampon ou buffering. Comme la capacité de transmission augmente de jour en jour, l’efficience énergétique et la taille deviennent des enjeux majeurs, et les meilleures solutions sont celles qui arrivent à saisir les avantages des propriétés à la fois de la lumière et de l’électronique.

Lte magazine : Depuis la fin des années 90, les fibres en plastique constituées de polymères ont commencé à émerger sur le marché, parallèlement aux fibres à base de silice. C’est quoi le futur des deux technologies et de leur application future.

Peter Schultz: Il y’a plusieurs différences clefs entre les fibres à base de plastique et ceux à base de silice, différences qui conditionne les fins de leur utilisation. Les télécommunications ont évolué pour opérer sur des longueurs d’ondes dans le spectre de l’infrarouge moyen, spectre où la fibre en silice introduit des pertes extrêmement faibles. Par ailleurs, la portion qui guide la lumière dans la fibre en silice est très petite et peut être contrôlé de façon très précise, ce qui permet de maximiser la capacité de transmission. Les fibres en plastique, d’un autre côté, introduisent fondamentalement des pertes importantes quand on utilise les ondes de télécommunications, et ainsi ces dernières doivent être relativement larges. Ceci limite l’application de la fibre plastique qu’à des distances relativement courtes, et quand la capacité d’information n’a pas à être maximisé. Les applications de la fibre en plastique tirent profit d’un attribut caractéristique à savoir la facilité de manipulation et d’installation surtout pour connecter les équipements électroniques grands publiques ou les équipements automobiles. Comme le volume des données générées et la capacité de traitement augmente en continue, la bande passante des équipements grands publique suivra cette tendance. Ceci élargira les applications et le volume d’utilisation de la fibre en plastique.

Lte magazine : Quels conseils auriez-vous pour les jeunes scientifiques africains pour suivre les nouvelles technologies de communication ?

Peter Schultz: En premier lieu, ils devraient rester à jour avec les derniers développements de leur domaine grâce aux publications techniques, prendre part aux conférences de classe mondiale comme l’OFC (The Optical Networking and Communication Conference & Exhibition) ou l’ECOC (The European Conference on Optical Communication) et participer à des formations adéquates de façon continue. Ensuite, ils devraient trouver un mentor avec qui ils pourront échanger sur ces derniers développements et déterminer quelles sont les difficultés actuelles sans solutions. Ce mentor peut être un collègue ou un conseiller dans la sphère soit académique, soit professionnel. Finalement, en travaillant sur des problématiques pointues, il faut chercher des solutions « out-of-the-box » non-conventionnelles, au lieu de poursuivre le même chemin que les autres chercheurs sont en train d’explorer. Les meilleures solutions sont généralement les plus « simples » et les plus « évidentes », mais bien sur seulement en rétrospective.

M.Peter Schultz et A. Khaouja dans l’usine fibre optique d’OFS de Tanger le 9 mai 2018.
M.Peter Schultz et A. Khaouja dans l’usine fibre optique d’OFS de Tanger le 9 mai 2018.

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