L’informatique a connu trois grandes révolutions marquées par trois décennies bien nettes caractérisées par
l’apparition d’innovations technologies spécifiques: les années 70 qui marquent les premiers jours de l’ordinateur, les années 80 avec l’apparition de la micro-informatique et les années 90 avec l’avènement d’Internet avec ses nouvelles technologies et ses nouveaux outils. Ces révolutions coïncident avec des périodes de profonds bouleversements dans les méthodes de travail, les outils utilisés et naturellement le profil des informaticiens ou plus précisément celui des personnels de l’informatique.
Pour ces derniers, les changements induits par le mouvement permanent de l’innovation technologique font appel à une remise à niveau permanente des connaissances et des aptitudes. C’est cela qui a fait dire à Dominique ROUX professeur agrégé à l’Université Paris Dauphine qu’il y avait de nouveaux métiers dans les entreprises eu égard à l’importance de la gestion de la « donnée » devenue le pétrole du 21ème siècle. Il s’agit de Chief data Officer (CDO), Data Protection Officer (DPO), Community Manager, Data scientist, etc.
Les responsables informatiques sont les premiers concernés du fait de leur position et de leur mission de pilotage des systèmes informatiques. Ils voient ainsi le référentiel de leurs activités changer régulièrement faisant subir de profondes mutations à leur profil et consacrant un concept nouveau qui a fini de se substituer aux anciennes appellations réductrices (Chef de service informatique, responsable informatique, directeur informatique) : le Directeur des systèmes d’information.
Mais tout d’abord qu’est-ce qu’un système d’information ?
Il peut être défini comme étant « l’ensemble des moyens humains, matériels, techniques et logistiques mis à la fois à contribution pour la génération, le traitement, la diffusion, la présentation, le stockage et la destruction de l’information au sein d’une organisation. De nos jours il est habituel de voir confondre les notions de « systèmes et réseaux informatiques » et celle de « systèmes d’information ». On dit donc qu’un système d’information est « un ensemble de ressources structurées permettant de collecter, traiter, stocker, acheminer, présenter ou détruire l’information quels que soient sa nature, son support ou son type de véhicule»
Cette absorption de l’informatique par un glissement de sa fonction classique au cœur des métiers de l’Entreprise a du mal à se traduire par un repositionnement stratégique de celle-ci au sein du dispositif décisionnel chargé d’en définir et orienter les actions.
Dans la plupart des entreprises et administrations et particulièrement au Sénégal et jusqu’à une date récente, le directeur du système d’information (DSI) ou celui qui en tient lieu était encore rattaché à des directions opérationnelles ou à la direction administrative et financière.
Cette situation traduit une vision dépassée qu’on s’était faite de la fonction informatique qui la cantonnait à de simples tâches techniques et dans de rares cas, administratives.
La conséquence immédiate est que de plus en plus on assiste à des restructurations qui bouleversent les liens hiérarchiques et qui placent la fonction informatique dans le système de pilotage de l’entreprise en la rattachant directement à la direction générale.
C’est ainsi que le rôle et les compétences attendus du nouveau responsable informatique, communément appelé Directeur des Systèmes d’Information (DSI), changent radicalement et sort des sentiers battus de la technique pure pour intégrer le domaine du management.
On est ainsi confronté à l’exigence sinon d’une définition d’un profil type, du moins à repenser la fonction du nouveau responsable informatique du point de vue de ses tâches quotidiennes afin d’élaborer un référentiel de formations complémentaires nécessaires à l’accomplissement de sa mission.
Quel référentiel de compétences ?
Un référentiel de compétences consiste en l’inventaire des activités liées à un métier ou une fonction dans une entreprise – sur la base des tâches effectivement réalisées par les collaborateurs – ainsi qu’en l’identification des compétences requises pour exercer ces activités, exprimées en capacités observables.
Il se construit sur la base d’une démarche participative sollicitant la collaboration d’un petit groupe représentatif de personnes exerçant le métier visé dans l’entreprise.
Le référentiel de compétences est un précieux outil de communication au sein d’une entreprise, entre les collaborateurs et la direction. En effet, la visualisation des pratiques réelles d’un métier au sein d’une entreprise permet d’en clarifier le contenu et les exigences, d’élaborer un cahier des charges conforme à la réalité et aux besoins de l’entreprise ou de définir l’évolution future du métier.
Par ailleurs, un référentiel permet de positionner les collaborateurs au regard des exigences du métier, facilitant ainsi l’élaboration de plans de formation personnalisés aux besoins de chacun et l’analyse du niveau de maîtrise dans l’objectif d’une démarche de reconnaissance ou de validation des acquis.
Quel profil et quelle fiche de poste pour les DSI ?
Les DSI actuels au Sénégal, d’une manière plus claire les responsables informatiques proviennent d’origines et de formations diverses. Aux premières années de l’informatique au Sénégal (75-90) les responsables informatiques étaient pour la plupart des techniciens issus d’autres domaines (mécanique, électricité, électronique, etc.) qui se reconvertissaient pour gérer l’informatique dans leurs entreprises).
A cette génération s’ajoutent les nouveaux responsables issus du renouvellement des postes, et ceux sortis des grandes écoles de commerce et d’ingénieurs formés sur les nouvelles technologies.
Il s’agira de partir d’un référentiel de compétences pour voir s’il y a lieu de définir un ou des profils-types pour la fonction de DSI.
Il semble nécessaire, partant du référentiel d’activités actuellement du ressort d’un DSI, de définir une sorte de lettre de mission récapitulant l’ensemble des tâches qui lui sont dévolues pour le pilotage efficient de son système d’information. Ces tâches devront être listées de manière exhaustive, mais aussi classifiées en tâches administratives et financières, techniques, de management et d’organisation. Cette double casquette du DSI, celle de stratège du numérique et d’architecte du système d’information, exige du titulaire du poste des qualités intrinsèques de manager. Chacun des aspects précédents pris individuellement ayant son importance et pesant de son poids dans la mission du DSI, il ne saurait être occulté ou même négligé au profit d’un autre.
Quel programme de formation pour les DSI ?
Au-delà de la formation initiale du DSI, il est nécessaire pour ne pas dire indispensable de faire appel à la formation continue ou continuée pour le mettre au diapason des changements et innovations technologiques sans cesse introduites dans les systèmes et les paradigmes.
En effet au rythme où évoluent les innovations et autres avancées technologiques, une formation continue permanente est incontournable pour permettre au DSI de se doter de compétences nécessaires au pilotage de sa structure et rester à jour pour le suivi de son système. Cette formation devra être axée sur les spécificités techniques de son système mais aussi sur des modules standard comme la conduite de projet, la gestion administrative et financière, etc.
Fin de la DSI ?
L’avènement du Cloud computing, de par son nouveau modèle, remet en cause et en profondeur, le positionnement stratégique de la DSI dans le management des organisations.
Dans celles-ci, la direction des systèmes d’information (DSI) ou ce qui en tient lieu constitue un des postes budgétaires les plus importants. Entre les ressources humaines de haute qualification dont il faut supporter les charges, les investissements de plus en plus coûteux à faire pour la permanente mise à niveau, les frais de fonctionnement, de formation du personnel, les frais d’entretien et de maintenance, le budget informatique ne cesse de croitre tiré qu’il est par les fréquentes innovations technologiques. Se pose alors la lancinante question de la pertinence, pour une organisation, de mettre autant de ressources sur un métier qui n’est pas sien et qui constitue, pour elle, juste une fonction support devant lui permettre d’améliorer ses performances sur son cœur de métier.
Avec une offre informatique externalisée, et nonobstant les problèmes de sécurité, de confidentialité des données, de haute disponibilité et de la qualité de service des solutions Cloud, les directions métiers seront sûrement enclines à se passer d’une DSI en interne pour faire appel à un prestataire extérieur. Que faire alors de tous ces spécialistes qui forment les équipes des DSI ? Qu’en sera-t-il des spécialistes en maintenance quand tous ces serveurs et PC deviendront virtuels ? En somme qu’adviendra-t-il de la DSI ?
Par Ndiaye Mbaye ingénieur informatique à l’ARCEP Sénégal
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