jeudi , 26 décembre 2024

Entretien avec Fahd Batayneh – l’ICANN

LTE Magazine a déjà réalisé un entretien avec M. Fahd Batayneh l’un des  représentants importants de l’ICANN à Marrakech en marge de la réunion de l’ICANN tenue à Marrakech en mars 2016

 

1- Tout d’abord on veut bien connaitre les points forts de l’ICANN dans la gouvernance de la toile internet ?

A l’ICANN, les politiques sont développées par une approche ascendante « Bottom-Up », avec consensus, et en impliquant toutes les parties prenantes afin de garantir que la communauté globale d’Internet contribue au développent de ce dernier.

La communauté ICANN a démontré qu’une approche ascendante peut marcher pour le développent des politiques, et son succès continue est l’une des raisons qui a poussé l’Administration Nationale Américaine des Télécommunications et de l’Information (NTIA) à confier l’administration des fonctions IANA à la communauté globale d’Internet.

2- L’ICANN avait adopté les principes directeurs de règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaines (UDRP). Est-ce que l’ICANN songe à actualiser ce règlement dans le cadre des différentes extensions envisagées et est-ce que l’ICANN va continuer à coopérer avec l’OMPI à ce sujet ?

La communauté ICANN revisite son règlement de temps à autre, et des améliorations sont toujours opérées sur le Mécanisme de Protection des Droits (RPM). Durant le développement du nouveau programme generic Domaine Top Level (gTLD), la communauté s’est mise d’accord sur la création de RPM additionnels, tel que la Suspension Uniforme Rapide (URS), ainsi que d’un dépositaire central des marques déposées (TMCH) qui aide à minimiser l’atteinte à ces marques à cause du lancement de centaines de nouvelles gTLD.

3- Avec l’émergence de l’internet des objets et la mise en place du protocole IPv6, comment l’ICANN et l’IANA s’organisent pour gérer l’ensemble des données qui seront générées avec cette évolution. Est-ce que les serveurs racines qui existent actuellement seront suffisants pour l’internet ou il est question de rajouter d’autres. Par exemple installé un en Afrique comme on a fait en Chine.

Le mandat de l’ICANN n’inclue pas la collecte générale des données web ou l’analyse de données. Le mandat est limité à la coordination des fonctions IANA, fonctions constituées des Nom de Domaines, les Ressources Nombres ainsi que les Paramètres des Protocoles.

L’ICANN soutien fortement l’IPv6, et on travaille avec les Registres Régionaux d’Internet (RIRs) pour la promotion de la migration vers l’IPv6.

Par rapport aux serveurs Racines, même s’il y’a par convention treize nom de serveurs racines (de ‘A’ à ‘M’), il existe physiquement plus que 500 copies de ces serveurs à travers le globe. ICANN gère le serveur racine ‘L’, qui a plus de 250 copies distribuées autour du globe. Le cas est similaire pour la Chine et l’Afrique, car il y’a des copies de serveurs racine dans les deux régions.

A cause de limitations techniques du format du paquet DNS, la convention de nommage ne peut pas gérer plus que les treize serveurs actuels.

4- L’Internet, est un service mondial ouvert au public, dont l’accès se fait à travers les différents réseaux de télécommunications. La question qui revient souvent : pourquoi l’ICANN est devenu indépendante par rapport au gouvernement américain alors que l’IANA qui est le bras technique de l’ICANN reste sous contrôle du gouvernement fédéral américain ?

Comme Internet a commencé à s’étendre rapidement vers la fin des années 1990, le gouvernement américain a compris que la gouvernance doit évoluer pour suivre le développement commercial d’Internet, et que le privé saura mieux gérer les ressources Internet. Le gouvernement américain a toujours considéré son administration de l’IANA comme temporaire, et la gouvernance de l’IANA sera in fine transférée à la dernière phase d’un processus étalé sur 17 ans pour le transfert de cette responsabilité.

Ce qui a déclenché l’annonce de mars 2014 faite par le gouvernement américain c’est la reconnaissance de la maturité organisationnelle de l’ICANN, grâce aux actions entreprises pour améliorer l’imputabilité, la transparence et la compétence technique, ainsi que l’augmentation du soutien international d’un modèle de gouvernance impliquant une multitude de parties prenantes.

Dans cette annonce, le gouvernement américain a demandé à l’ICANN d’organiser une discussion globale qui engage l’ensemble des parties prenantes pour développer collectivement une proposition de transition respectant des critères clés. Depuis cette annonce, l‘ICANN a convoqué ces parties prenantes pour la détermination des processus de transfert de la gouvernance des fonctions IANA, et après des milliers d’heures de collaboration, le plan proposé a été soumis à la NTIA le 10 Mars 2016, durant la 55ème réunion publique de l ‘ICANN à Marrakech.

Une transition réussie va garantir que tous les membres de la communauté globale d’Internet, y compris les petites et grandes entreprises, experts techniques, société civile, les chercheurs, académiciens, gouvernements et utilisateurs finaux, seront des partenaires dans l’expansion et l’innovation continue d’un Internet unifié et unique.

On encourage la communauté globale d’Internet de suivre la transition de la gouvernance IANA, vu que le processus sera achevé dans les semaines à venir.

5- Aux Sommets mondiaux pour la société de l’information (SMSI) de Genève en 2003, puis de Tunis en 2005, de la réunion d’Athènes en 2006 et au sommet de l’UIT de Dubaï 2012 : on demande un cadre de concertation multilatéral pour l’ensemble des questions liées à la gouvernance de l’Internet. Que pensez-vous de cette demande ? Il faut reconnaitre que l’un des points forts de l’ICANN actuellement est l’implication aussi de la société civile dans la gouvernance de l’internet.

La gouvernance d’Internet découle d’une ‘coordination’ plutôt que d’une ‘gouvernance’, et devrais être distribuée et polycentrique. Le modèle multi parties prenantes est le seul moyen de gouverner Internet de façon fluide et efficiente toute en garantissant que tout le monde a une voix dans le développement d’Internet.

La gouvernance d’Internet est un processus évolutif, et les problèmes et litiges existeront tant qu’Internet continue à évoluer. C’est à ce niveau que votre soutien et implication sont nécessaires.

Par ailleurs, la force de l’IGF dépend du fait que toutes les parties prenantes, y compris la société civile, contribuent aux discussions sur un pied d’égalité. Le processus multi partie prenante est un dispositif inclusif qui engage des acteurs qui s’étendent de la société civile aux secteurs privés.

Les ouvertures sont les fondations de la gouvernance ascendante de l’ICANN, où chaque individu a une opinion dans le développement du Framework règlementaire de l’ICANN. On travaille toujours pour augmenter la participation des parties prenantes quel que soit leur nature, indépendamment du fait qu’ils soient de la société civile, sphère commerciale, gouvernements, experts techniques ou simple utilisateur d’Internet.

6- Dans le cadre de l’IPv6 est ce que les alphabets existant seront suffisants pour prévoir les besoins des usagers.

Alors que la plage d’adresse actuelle IPv4 est constitué uniquement de 4.3 milliards d’adresses uniques, desquelles seulement 3.7 milliards sont utilisables, IPv6 offrent 390 trillion trillion trillion d’adresses IP uniques, ce qui est plus que suffisant pour répondre au besoin d’adressage d’un internet en plein croissance.

7- Enfin est ce que vous pouvez nous parler des défis de l’ICANN pour les prochaines années ?

Tant qu’Internet continue à évoluer, les travaux entrepris à l’ICANN évolueront également. L’un des challenges est comment connecté non seulement le prochain milliard d’utilisateurs, mais les milliards qui viendront après ! A ce jour, il y’a seulement aux alentours de trois milliards d’individus connectés à Internet. Comme Internet s’élargit et se développe, de nouveaux besoins verront le jour.

Pour illustration, considérant le nouveau programme gTLD and l’introduction du Nom de Domaine Internationalisé (IDN). Les utilisateurs Internet à travers le monde sont maintenant capables d’être en ligne en utilisant un Nom de Domaine entièrement dans leurs langues et lettres natives. Ceci encouragera l’utilisation d’Internet autours du globe, et particulièrement dans les régions non suffisamment desservies par Internet. Cependant, il y’a toujours un besoin d’expert en Internet et linguistique pour former des panels pour ces lettres et caractères. Notre mission à l’ICANN est d’encourager et faciliter l’organisation de ces panels pour une appropriation réussie des IDN. Ceci est essentiel pour la validation des IDN TLD et la détermination de leurs variantes dans la zone racine.

ICANN travaille également très dur pour globaliser l’exploitation de ses activités. Au long des années antérieurs, l’ICANN a établi une présence physique tout autour du monde. On a maintenant des hubs localisés à Istanbul, Los Angeles et Singapour, qui font office de sièges pour l’exploitation des activités opérationnelles pour différentes régions. Nos centres d’engagements à Beijing, Bruxelles, Genève, Montevideo, Seoul et Washington bénéficient d’une portée et accessibilités bien plus grandes.

Notre travail ne sera jamais terminé, et nous continuerons à assurer qu’Internet restera ouvert, singulier et sécurisé.

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