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Synthèse de la conférence de T. Piketty (*) assurée à Rabat le 23/1/2020 sur « l’évolution des inégalités des revenus », à l’occasion de la publication de son livre «Capital et idéologie», paru en 2019
Khaouja à Rabat avec l’économiste français T. Piketty (*).Khaouja à Rabat avec l’économiste français T. Piketty (*).

Synthèse de la conférence de T. Piketty (*) assurée à Rabat le 23/1/2020 sur « l’évolution des inégalités des revenus », à l’occasion de la publication de son livre «Capital et idéologie», paru en 2019

On trouvera vers la fin de cette synthèse la question posée par Lte magazine à M Thomas Piketty. 

Capital et idéologie en huit points :

Dans sa conférence à Rabat le 23 janvier 2020, Thomas Piketty a exposé l’évolution des idéologies et de leur relation avec l’évolution des inégalités des revenus et du capital dans le temps et dans l’espace.

Ci-après en huit points et en résumé les points saillants traités par Thomas Piketty à Rabat :

1- Parmi les différentes formes des « régimes inégalitaires » qui ont existé dans l’Histoire on cite les régimes ternaires où la population est séparée en trois classes : dirigeants guerriers, clergé et travailleurs,  le régime propriétaire, où règne l’idéologie de la propriété privée, le régime esclavagiste puis régime colonial.

2-L’analyse de l’histoire sociale et économique démontre que les inégalités au niveau des revenus et du capital sont généralement en relation avec les idéologiques. Les inégalités découlent de l’histoire même des nations et des structures sociales. Les « élites » essayent le plus souvent de démontrer que les inégalités au niveau des revenus sont des phénomènes naturels.  Alors que d’après Thomas Piketty ces phénomènes des inégalités ne sont pas naturels. Elles varient fortement dans le temps et dans les différents pays en fonction souvent de l’idéologie politique en vigueur.  A part la religion, l’idéologie est issue généralement des philosophies d’action comme fut le cas du communisme début du siècle dernier.

3-La Révolution française de 1789 n’a pas marqué un tournant dans la répartition des propriétés privées en France. Si la part des 1% les plus riches dans le total des propriétés privés a diminué jusqu’en 1800, elle est par la suite repartie à la hausse, tout comme celle des 10% les plus riches (voir graphique ci-après).

4-De leur côté, les sociétés coloniales figurent parmi les régimes les plus inégalitaires observés dans l’histoire, voir graphique ci-après :

5- L’analyse historique de différents régimes démontre l’émergence au XXe siècle d’un système permanent d’impôt progressif. La France a été l’un des derniers pays à adopter l’impôt progressif sur le revenu en 1914. Il était déjà en place dès 1870 au Danemark, 1891 au Japon ou 1909 au Royaume-Uni.

6- La période entre 1950 et 1980 marque l’âge d’or avec une importante réduction des inégalités dans de nombreux pays (notamment en Europe). Mais depuis 1980, selon Thomas Piketty, on assiste à un   «retour d’une très forte concentration de la propriété, doublée d’une opacité financière».

7- Thomas Piketty explique que c’est le combat pour l’égalité et l’éducation, et non pas la sacralisation de la propriété, qui a permis le développement économique et le progrès humain durant cette période allant de 1950 à 1980.

8-En ce qui concerne l’état des inégalités observés en Occident depuis la vague des désengagements et de l’hyper productivité depuis les années 80, Piketty constate que les inégalités des revenus ont augmenté comme le montre les deux graphiques ci-après :

9- Thomas Piketty propose des solutions pour la réduction de ces inégalités économiques. Ces solutions consistent de redistribuer le capital des acteurs économiques les plus riches par notamment le bais de la fiscalité ou de la co-gestion des entreprises, via la représentation des salariés dans les conseils d’administration ou de surveillance des grandes entreprises. En limitant ces richesses individuelles, il espère que le patrimoine distribué plus équitablement luttera efficacement contre les inégalités économiques en place. Voir graphique ci-après concernant la corrélation entre l’accès à l’université aux USA et le pouvoir d’achat des familles.

Question posée par Lte magazine à M. Piketty à la conférence du 23/1/2020  à Rabat :

Question : Les idéologies que vous avez exposées lors de votre conférence sont plutôt en relation avec les politiques issues de la philosophie d’action comme le communisme ou le socialisme. Mais vous n’avez pas évoqué l’apport des religions dans le temps et dans l’espace ? Alors que vous avez déclaré récemment que « L’histoire des inégalités, c’est d’abord l’histoire de la quête de la justice dans laquelle les religions jouent un rôle important ».  

Réponse : Certes les religions ont joué un rôle important dans la quête d’une justice sociale comme en témoigne l’enseignement des papes, depuis Léon XIII et jusqu’à François aujourd’hui. Par rapport à la religion musulmane je reçois des écrits par rapport au rôle de la Zakat dans la réduction des inégalités. La zakat pourra jouer un rôle important dans ce sens mais est-ce qu’un milliardaire du moyen orient est en mesure de payer la zakat annuellement sur ses revenus ? Là aussi on retrouve le problème du manque de la transparence comme dans le système fiscal moderne ! 

(*) : Thomas Piketty est un économiste français. Directeur d’études à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) à Paris et professeur à l’Ecole d’économie de Paris/Paris School of Economics. Il a publié de nombreux articles de recherche dans des revues internationales ainsi qu’une dizaine de livres. Ses travaux ont conduit à remettre en cause radicalement l’hypothèse optimiste sur le lien entre développement et réduction des inégalités, et à mettre en évidence l’importance des institutions politiques, sociales et fiscales dans la dynamique historique de la répartition des richesses. Il a reçu de nombreux prix tout au long de ses études et de ses recherches. M. Thomas Piketty est connu mondialement. Sa posture internationale s’est élargie avec la publication en 2013 de son livre «Le Capital au XXIème siècle» et en septembre 2019 de son livre «Capital et Idéologie».

Par www.LTEmagazine.com

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