mercredi , 16 octobre 2024

L’histoire de la physique quantique

Par Ahmed Khaouja (*)

Introduction :

La physique quantique est une physique de rupture par rapport à celle dite classique. Elle est régie par des lois très différentes de celles de la physique classique. Si la physique classique est dite déterministe, celle de la physique quantique est dite indéterministe car probabiliste. Cet article retrace l’histoire de la physique quantique et ses applications.

Les origines de la physique quantique :

Les racines de la physique quantique remontent à la fin du XIXe siècle, lorsque les scientifiques ont commencé à découvrir des phénomènes que la physique déterministe classique ne pouvait pas expliquer, tels que le rayonnement du corps noir. En 1900, Max Planck a introduit l’idée de quanta d’énergie pour résoudre le problème du rayonnement du corps noir. Ce concept révolutionnaire a été la première étape vers la formulation de la mécanique quantique. Max Planck déduit sa loi de manière empirique.  Il la justifie en postulant que l’énergie émise ou absorbée par les oscillateurs ne se fait que par petits paquets d’énergie E. Ces paquets (quantas) seraient directement reliés à la fréquence des oscillations selon la formule, E = h × ν, qu’il expose le 14 décembre 1900 où :

  • ℎ est la constante de Planck ;

  • νest la fréquence du rayonnement électromagnétique.

Max Planck en 1901.

A l’aide de ces quantas, Albert Einstein explique l’effet photoélectrique, démontrant que la lumière peut être considérée comme des quanta ou photons.

La naissance de la mécanique quantique :

Les années 1920 ont marqué l’avènement de la mécanique quantique moderne. En 1925, Werner Heisenberg a développé la mécanique matricielle, une formulation mathématique de la mécanique quantique. Peu de temps après, en 1926, Erwin Schrödinger a introduit la mécanique ondulatoire, une autre approche pour décrire le comportement des particules atomiques. La célèbre équation de Schrödinger a permis de comprendre les états quantiques des systèmes physiques.

Le principe d’incertitude et les interprétations de Copenhague :

En 1927, Werner Heisenberg a formulé le principe d’incertitude, qui stipule qu’il est impossible de connaître simultanément la position et la vitesse de mouvement d’une particule. Cette idée a été l’un des piliers de l’interprétation de Copenhague de la mécanique quantique, principalement défendue par Niels Bohr. Selon cette interprétation, les observables quantiques n’ont pas de valeurs définies tant qu’elles ne sont pas mesurées.

L’Époque de l’Électrodynamique Quantique :                             

Dans les années 1940 plusieurs physiciens dont notamment Richard Feynman, Julian Schwinger et Paul Dirac ont développé l’électrodynamique quantique, une théorie qui décrit l’interaction entre la lumière et la matière. L’électrodynamique quantique a été la première théorie quantique à incorporer les principes de la relativité restreinte, et elle a été saluée comme une réalisation majeure. Depuis les années 1970, la physique quantique n’a cessé d’évoluer, avec des découvertes telles que la chromodynamique quantique et la théorie des cordes. La chromodynamique quantique décrit les interactions fortes entre les quarks et les gluons.

En 1967, avec Steven Weinberg, Abdus Salam propose une théorie permettant d’unifier les interactions électromagnétique (physique classique) et faible entre particules élémentaires (quantique) théorie qui sera confirmée par l’expérience. Pour ce travail, Abdus Salam, recevra un prix Nobel de physique en 1979. Durant les années 50 Abdus Salam enseignait l’électromagnétisme et la mécanique quantique à Cambridge.

Muhammad Abdus Salam en 1987

Développements récents :

Depuis le début des années 1980, on assiste au commencement d’une deuxième révolution de la physique quantique. En 1982, l’équipe du physicien français Alain Aspect parvient à démontrer la réalité du principe d’intrication quantique, concept fondamental de la physique quantique. Les particules constituant un système sont liées, et le restent quelle que soit la distance qui les sépare. Ainsi, pour une paire de photons, une mesure faite sur l’un modifiera instantanément l’état du second, même s’ils sont séparés d’une longue distance.

Alain Aspect en 2016

Cette propriété pourrait avoir des applications importantes dans le domaine de l’information quantique et dans le développement des ordinateurs quantiques. Grace à l’intrication une communication quantique a été réalisée aux iles Canaries entre Las Palmas et Tenerife, soit sur une distance de 144 km. Cette réalisation a été effectuée par l’équipe du physicien et prix Nobel autrichien Anton Zeilinger.

Les applications de la mécanique quantique :

La mécanique quantique est déjà à la base de technologies révolutionnaires, comme les lasers utilisés notamment dans la FTTH et les IRM (Imagerie par résonance magnétique) utilisés dans l’imagerie poussée en médecine. Technologies qui ont un impact direct sur notre quotidien. L’effet laser est obtenu dans un système où les électrons sont majoritairement dans un même état excité et se désexcitent tous ensemble en émettant cette lumière intense. Cette transition des électrons d’un niveau d’énergie à un autre est un processus quantique.

L’ordinateur quantique va permettre en Médecine à « Modéliser des réactions chimiques à l’échelle moléculaire, prédire les interactions entre les protéines et les médicaments… L’informatique quantique promet d’ouvrir le champ des possibles en matière de nouveaux traitements et vaccins, pour faciliter voire accélérer leur élaboration ou leur production. », explique Sophie Proust.

Dans le domaine de l’Énergie « Les technologies quantiques auront aussi une carte à jouer dans l’optimisation des réseaux intelligents, ou smart grids », ajoute Sophie Proust. Comment orienter l’électricité produite de manière efficace en fonction de la demande et des capacités de production ?

Conclusion :

La physique quantique a parcouru un long chemin depuis les premières observations de phénomènes inexplicables par la physique classique et ce grâce aux contributions clés de nombreux scientifiques, dont Planck, Heisenberg, Schrödinger et Feynman. Aujourd’hui cependant, plusieurs problèmes demeurent encore non résolus. Par exemple la décohérence et la correction des erreurs demeurent des obstacles majeurs pour le développement d’un ordinateur quantique. Nous sommes encore loin d’un ordinateur quantique parfait, car les bits quantiques (qubits) dont nous disposons ne sont pas stables et subissent ce que l’on appelle la « décohérence » lorsqu’ils interagissent avec leur environnement. Cela signifie qu’au bout d’un certain temps ils se comportent comme des objets classiques et perdent l’information quantique qu’ils contiennent. La décohérence est un obstacle à la réalisation d’un ordinateur quantique et va demander un gros effort technologique.

(*) : Ahmed Khaouja physicien et ingénieur télécom.

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